Les 5 opportunités de mobilité durable en 2021

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Bertrand Gélinas
Bertrand Gélinas
Le fondateur qui n’a pas peur de foncer pour dénicher des opportunités
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Les villes tentent de se réinventer constamment et, plus que jamais, intègrent de nouveaux concepts novateurs pour favoriser la prise de conscience des citoyens et les changements de comportement en faveur de la mobilité durable. Bien que nous assistions à la recrudescence de petits et grands projets dans diverses villes du Québec, il n’est pas toujours évident de comprendre les motivations sous-jacentes à celle-ci, si ce n’est que de réduire les émissions de gaz à effet de serre et réduire l’impact des changements climatiques.

Ajouté à cela, nous avons devant nous un théâtre pour l’expérimentation de projet en lien avec la reprise économique, qui s’est déjà amorcée. Celle-ci met en lumière plusieurs opportunités économiques et environnementales qui ne sont  certainement pas à négliger. Voici les 5 opportunités en ce qui concerne la mobilité durable pour 2021.

Favoriser l’achat local

Ce n’est pas une surprise de voir des projets comme le Panier Bleu surgir de nulle part avec l’augmentation phénoménale des achats effectués en ligne par les Québécois. En effet, de février à mai 2020, les ventes au détail du commerce électronique ont presque doublées (+99,3 %) et certains détaillants se fient maintenant davantage à cette méthode de vente. Malgré tout, on peut toutefois tenir compte que 82% des Québécois font des efforts pour acheter local. La hausse de l’achat local peut donc sembler illogique compte tenu de la tendance actuelle à l’achat en ligne.

La question à se poser est : qu’est-ce que l’achat local?

Le Fonds de solidarité FTQ définit « acheter local » par

[Acheter local,] c’est favoriser l’achat de produits manufacturés et cultivés au Québec, faire ses achats dans des commerces indépendants du quartier ou préférer les entreprises québécoises aux grandes multinationales.

Acheter local, c’est donc le terme principalement utilisé pour classifier les achats effectués dans les commerces du Québec. Ce qui veut dire que l’achat d’un produit dans une boutique du Québec relève de l’achat local, indépendamment de la provenance de celui-ci. Fait étonnant : en Amérique du Nord, les aliments parcourent en moyenne 2600km avant d’arriver à votre assiette. Tous ces kilomètres peuvent en faire réfléchir plus d’un lorsque vient le temps de consommer des produits exotiques qui sont associés à une empreinte écologique plus importante.

Que ce soit pour réduire la distance entre le domicile et le commerce ou entre le producteur et le détaillant, il est évident que des efforts doivent être faits pour réduire la quantité d’émission de GES reliée à la consommation d’un produit.

Et l’intermodalité?

L’importance de prendre en compte l’intermodalité dans sa stratégie de mobilité durable est de plus en plus réelle avec la croissance de l’étalement urbain en périphérie des grandes villes comme Montréal et Québec. L’Association québécoise des transports définit l’intermodalité comme la combinaison des divers modes de transport pour se rendre d’un point A à un point B.

Bien qu’une grande majorité d’étudiants et de travailleurs la pratique sans le savoir, l’intermodalité fait partie de notre quotidien et comprendre les comportements d’intermodalité sur son territoire permet de saisir les occasions de les cibler avec des campagnes marketing ou de sensibilisation adressées aux utilisateurs. C’est pour encourager l’intermodalité que les urbanistes mettent en place des pôles de mobilités favorisant la création organique de cocktails de mobilité, suffisamment intéressants pour répondre à tous les profils de déplacement. C’est d’autant plus important de considérer l’intermodalité dans sa stratégie de compétitivité des transports viables étant donné la difficulté de certaines régions à répondre à tous les besoins de mobilité uniquement avec le transport en commun.

Que ce soit par l’autopartage, le vélopartage, les stationnements réservés pour le transport en commun ou les pistes cyclables, une bonne stratégie d’intermodalité sur un territoire s’implante à l’aide de connaissances approfondies des comportements de déplacements de ses citoyens.

La reprise du transport en commun

Ce serait un leurre de dire que le transport en commun n’a pas été affecté par la pandémie. En effet, on peut constater une chute de 85% de l’utilisation du transport en commun dans le pays en 2021. Une bonne partie de ses utilisateurs font maintenant du télétravail, mais beaucoup d’entre eux ont simplement modifié leurs habitudes de déplacements pour utiliser l’auto solo, jugée moins risquée pour la contagion de la Covid-19.

On parle aussi d’une reprise de l’achalandage qui pourrait prendre jusqu’à 10 ans, de quoi prendre le temps de réfléchir à plusieurs initiatives. On peut cependant s’attendre à une augmentation des coûts et une diminution du service entre 2022 et 2025 à Montréal. 

Selon les prédictions gouvernementales, c’est à l’automne 2021 que la plupart des consignes de santé publique seront levées. Par conséquent, une proportion non-négligeable des étudiants et des travailleurs seront prêts à retourner travailler ou étudier dans les entreprises et les établissements d’enseignement qu’ils fréquentaient auparavant. Ces gens auront donc un choix à faire : le transport en commun or not le transport en commun?

Les villes et les sociétés de transport ont tout intérêt à investir dans la sensibilisation des citoyens au bienfait de l’utilisation du transport en commun et c’est avec beaucoup d’intérêt que les villes du Québec (et moi-même) auront les yeux rivés sur les grandes sociétés de transport pour voir comment ils expérimentent à l’intérieur de ce nouveau paradigme. En 10 ans, on peut voir beaucoup de projets naître.

Impliquer les citoyens dans la solution

La diminution des déplacements en auto solo ne passera certainement pas seulement par la mise en place de nouvelles pistes cyclables ou de nouveaux trajets d’autobus. En effet, il est essentiel de considérer la collaboration des citoyens et de les placer au centre de la stratégie de mobilité durable des villes et des municipalités. C’est d’ailleurs avec cela en tête que le gouvernement du Québec a mis en place sa politique de mobilité durable pour 2030 en ciblant une diminution de 20% des déplacements effectués en auto solo à l’échelle nationale. Ambitieux, n’est-ce pas?

Ensuite, bien qu’il ne soit pas directement associé à leur comportement de mobilité, on peut considérer que la pandémie a ouvert une porte aux citoyens à prendre conscience des effets environnementaux de leurs déplacements. Une étude menée par la ville de Montréal (prépandémie) met aussi en lumière la prise de conscience environnementale par plus de 80% des répondants. Avec un taux aussi élevé de participants conscientisés et un taux d’adoption aussi faible, on peut considérer qu’une pièce du puzzle est manquante. Beaucoup de citoyens n’attendent qu’un déclencheur pour effectuer un changement de comportement en faveur de la mobilité durable.

Des projets comme le Défi sans auto solo permettent aux entreprises de faire leur part pour une durée d’une semaine et de favoriser le transfert modal auprès de leurs employés. Encouragées par ce projet, plusieurs personnes n’ayant jamais vraiment pensé à utiliser un nouveau mode de transport ont alors l’occasion de le faire et peuvent même gagner un prix dans le cadre du défi. Il s’agit d’une méthode douce utilisée comme levier d’influence afin de mener les utilisateurs vers la « bonne décision » et éventuellement les y faire adhérer par intérêt personnel. Ce défi est un excellent exemple de la réception et de la volonté des citoyens à participer aux initiatives de mobilité durable.

Collecter des données contextuelles

En tant que fondateur de Greenplay et à travers mes nombreuses années dans le domaine de l’intelligence d’affaires, je me suis rendu compte de la difficulté que représentait la prise de décision à partir de données collectées de diverses sources. Combien de fois m’a-t-on fait part de craintes sur la consommation d’ensembles de données et des précautions à prendre pour le faire, sous toutes réserves? On essaie souvent de faire parler les données existantes à notre avantage et bien que cela soit un défi, il n’est pas impossible de le faire, mais encore faut-il choisir les bonnes sources et le bon contexte. Un concept de base, me direz-vous, mais qui « prend le bord » à plusieurs reprises lorsque vient le temps d’annoncer de grandes décisions concernant la mobilité durable.

Bien que plusieurs études aient démontré que les orientations gouvernementales québécoises des années 70 en termes d’urbanisme furent de réaliser l’archétype de l’urbanité moderne des banlieues et ainsi favoriser l’étalement urbain et l’utilisation de l’auto solo, il semble que nous sommes encore aujourd’hui coincés dans la même spirale politique en ce qui concerne les décisions gouvernementales. Il faut donc se rappeler l’importance de mettre de l’avant les nombreuses études scientifiques déjà effectuées sur la mobilité durable, mais également la nécessité de prendre connaissance de la réalité de la mobilité des citoyens d’aujourd’hui.

Beaucoup d’études offrent une quantité de données intéressantes, mais elles nécessitent beaucoup de traitement en aval afin d’être exploitables par les divers organismes ou ministères qui souhaitent en tirer des conclusions. Des annonces publiques intrigantes, à la limite farfelues, nous ont démontré que les décideurs aiment s’appuyer sur les enquêtes Origine destination pour prendre des décisions d’envergure, comme la construction d’un 3e lien entre Québec et Lévis. Ces enquêtes doivent donc être utilisées avec prudence.

De plus, les grandes villes comme Montréal et Québec reconnaissent la nécessité d’obtenir une complémentarité aux données des enquêtes O-D, notamment par la collecte de données automatique et géolocalisée avec des projets comme Montréal-Trajet ou Mon trajet. Bien qu’ils soient ponctuels, ces projets ont permis à ces villes d’obtenir des données sur les déplacements réels des citoyens ainsi que leurs utilités et viennent contribuer à d’autres études qui pourraient être moins adaptées à la situation géographique d’une ville.

En faire un peu plus

La situation actuelle amène son lot de complexité et c’est avec la plus grande attention que les villes et les municipalités doivent adresser les enjeux de mobilité durable. Elle doivent mettre en place des initiatives avec comme objectif le retour aux bonnes habitudes. Sans mettre en place de trop grands projets d’infrastructure, il est possible de prendre des initiatives qui auront un impact significatif et ne demanderont pas trop de ressources pour favoriser la reprise de nos bons comportements de mobilité.